Peine à Jouir

Sex-shop historique rue Jules Ferry à Quimper, devanture rouge avec enseigne bleue et guirlandes lumineuses

ll est toujours là, comme un mauvais souvenir qu'on n'ose pas jeter.
Coincé entre une porte d'immeuble anonyme et un garage blanc, le sex-shop de la gare de Quimper fait face au temps avec une obstination silencieuse.

La peinture rouge est intacte, presque trop vive. Le mot "SEX" s'affiche en majuscules d'un bleu foncé qui semble défié par les années mais pas par la fatigue. La vitrine est habillée de rideaux lumineux faussement festifs, décor qui peine à masquer l'absence.
À l'intérieur, on devine sans peine la solitude.

Ces endroits étaient autrefois des points de fuite, des refuges maladroits pour ceux qui n'osaient pas regarder leurs désirs en face.
On entrait vite, on sortait plus vite encore.
Des visages effacés avant même d'avoir été remarqués. Aujourd'hui, le rideau est resté tiré, mais les clients ont déserté.
La honte s'est numérisée.

Ce sex-shop est devenu un décor, une coquille vide, vestige d'une façon de consommer qui n'a plus lieu d'être.
Plus personne n'a besoin de ces lieux pour désirer ou transgresser.
Mais il reste, comme une sorte d'archive urbaine, rappelant qu'il y a encore peu de temps, tout cela était bien réel.

Il faut passer devant plusieurs fois pour réaliser qu'il n'a pas bougé d'un centimètre depuis un demi-siècle.
On pourrait croire qu'il attend quelque chose, mais il n'attend plus rien.
Il s'accroche, juste parce que personne n'a pris la peine de l'effacer.